Templates de prompts pour réduire les hallucinations des LLM sur les données d'entreprise

Les grands modèles linguistiques (LLM) sont devenus des outils puissants dans les entreprises, mais ils mentent souvent - pas par malice, mais parce qu’ils remplissent les trous de connaissance avec des informations inventées. C’est ce qu’on appelle les hallucinations. Dans un contexte d’entreprise, une hallucination peut coûter cher : un rapport financier erroné, une recommandation médicale fausse, ou un contrat basé sur des données falsifiées. La bonne nouvelle ? Il existe une solution simple, peu coûteuse et efficace : les templates de prompts structurés.

Comment les templates réduisent les hallucinations

Un prompt classique comme « Quel est le chiffre d’affaires de notre filiale en Asie ? » donne un résultat aléatoire. Le modèle va chercher dans ses données d’entraînement, pas dans vos fichiers internes. Il peut répondre avec une estimation, un chiffre tiré d’un autre secteur, ou même inventer un chiffre plausible.

Un template bien conçu, lui, change tout. Il oblige le modèle à suivre une structure. Par exemple :

  1. Basez votre réponse uniquement sur les données du dépôt finance-q3-2024 dans Milvus.
  2. Si la réponse n’est pas clairement présente dans ces données, dites « Je ne sais pas ».
  3. Expliquez votre raisonnement étape par étape.
  4. Citez explicitement la source utilisée.
Selon une étude de Promptfoo sur 50 systèmes RAG en entreprise (novembre 2024), ce type de template réduit les hallucinations de 28,7 % à seulement 5,1 %. Ce n’est pas une amélioration mineure : c’est un saut de qualité qui transforme un outil risqué en un outil fiable.

Les cinq éléments clés d’un bon template

Pas tous les templates sont égaux. Les meilleures pratiques, validées par des dizaines d’implémentations dans des entreprises comme SUSE, JPMorgan ou des hôpitaux, reposent sur cinq piliers :

  • Définition claire de la tâche : Ne dites pas « Parlez-moi des produits ». Dites « Décrivez les fonctionnalités du produit X, en vous basant uniquement sur le document produit-v4.pdf ».
  • Obtention obligatoire des sources : Chaque réponse doit mentionner explicitement la source : « Selon le rapport financier Q3 2024, section 3.2 ». Cela force le modèle à rester ancré dans vos données.
  • Chaîne de raisonnement (Chain-of-Thought) : Exigez que le modèle explique comment il est arrivé à sa réponse. « D’abord, j’ai cherché le chiffre d’affaires dans le fichier X. Ensuite, j’ai comparé avec la tendance des trois derniers trimestres. » Cela rend les erreurs plus visibles.
  • Décomposition des tâches complexes : Pour une question comme « Quel est l’impact de la nouvelle réglementation sur nos ventes ? », divisez-la en sous-questions : « Quelle est la réglementation ? Où est-elle mentionnée dans nos documents ? Quels produits sont concernés ? Quelles sont les ventes passées pour ces produits ? »
  • Barrières contextuelles : Ajoutez des exemples de bonnes et mauvaises réponses. Cela guide le modèle comme un bon manager donne des retours concrets.

Une étude du MIT a montré que les templates avec citation obligatoire réduisent les hallucinations de 68 %. Mais seulement si les sources sont vérifiables et si la similarité vectorielle des documents récupérés dépasse 0,72. Sans cela, le template est inutile.

Comparaison des approches : une seule étape ou deux ?

Il existe deux grandes stratégies pour concevoir ces templates.

L’approche en une seule étape (Joint Method) : vous mettez tout dans un seul prompt - la question, les sources, les instructions de raisonnement, les exemples. C’est plus rapide, et ça réduit les hallucinations de 82 %. Mais il y a un risque : le modèle peut répéter des phrases ou se bloquer sur des formulations trop rigides. Sur Reddit, un ingénieur chez JPMorgan a vu ses réponses devenir trop mécaniques après 2 semaines d’utilisation.

L’approche en deux étapes (2-Step Method) : la première demande au modèle de réfléchir, la seconde de formuler une réponse structurée. Par exemple :

  1. Prompt 1 : « Analysez les documents suivants et expliquez pourquoi la réponse à cette question est ou n’est pas possible. »
  2. Prompt 2 : « En vous basant sur l’analyse précédente, donnez une réponse concise et citez les sources. »

Cette méthode réduit les hallucinations à 89 %, mais elle ralentit la réponse de 15 à 20 %. Pour les appels clients en temps réel, ce retard peut être un problème. Pour les rapports mensuels, c’est parfait.

Les équipes qui réussissent combinent les deux : une étape de raisonnement pour les questions complexes, et une étape unique pour les requêtes simples. C’est ce que Datadog a mis en place avec succès en 2024, réduisant les erreurs de 89 % dans leurs systèmes internes.

Deux personnages en argile comparant deux méthodes de prompt, avec une bulle de pensée et des scores de similarité flottants.

Les pièges à éviter

Même les meilleurs templates peuvent échouer si on les mal utilise.

  • Trop de contraintes : Si vous exigez « Je ne sais pas » pour chaque incertitude, vous allez obtenir des réponses vides dans 40 % des cas. C’est ce qui s’est produit sur un projet LangChain : les utilisateurs ont abandonné parce que le système répondait trop souvent « Je ne sais pas ».
  • Source mal connectée : Si votre template demande « Basé sur la collection 'clients' dans ChromaDB », mais que vos données sont dans une collection appelée 'clients-2024', le modèle ne trouvera rien. Et il va inventer. Un cas réel chez un fournisseur de logiciels a causé une erreur de 37 % dans les prévisions de vente.
  • Manque de précision métier : Un template générique pour la finance ne fonctionne pas. Un hôpital a utilisé un template standard pour répondre à des questions sur les médicaments. Le modèle a halluciné des doses - 200 mg au lieu de 20 mg - parce que l’unité n’était pas précisée. Le système a dû être arrêté pendant 12 jours.
  • Température trop élevée : Si vous laissez la température à 0,7 ou plus, le modèle devient créatif. Pour les données d’entreprise, utilisez 0,2 à 0,3. Top-p à 0,85 maximum. C’est une règle simple, mais souvent ignorée.

Quels outils choisir ?

Vous n’avez pas besoin d’acheter un logiciel coûteux. Les solutions open source sont souvent meilleures.

LangChain domine le marché open source avec 63 % de part. Il propose plus de 3 200 discussions sur GitHub sur les templates d’entreprise. Son avantage ? La flexibilité. Vous pouvez construire des templates pour n’importe quel type de données : SAP, Salesforce, PostgreSQL, Excel.

AWS Bedrock offre des templates prêts à l’emploi pour les données AWS, avec une réduction des hallucinations de 92 %. Mais si vos données sont dans un système non-AWS, ses performances chutent de 27 %. C’est un piège pour les entreprises hybrides.

SUSE AI publie une bibliothèque de 47 templates spécifiques à des secteurs : finance, santé, logistique. Chaque template inclut des métriques de test. C’est rare. La plupart des fournisseurs ne donnent que des exemples basiques.

Les entreprises qui réussissent utilisent LangChain pour construire leurs propres templates, et les testent sur des cas réels avant de les déployer. Elles ne copient pas des exemples trouvés sur Internet - elles les adaptent à leurs données.

Ligne de production en argile où un LLM est façonné par cinq éléments clés de prompt, aboutissant à une réponse précise.

Combien de temps ça prend ?

Développer un template efficace n’est pas une tâche de 10 minutes. Les équipes investissent entre 80 et 120 heures pour créer, tester et affiner un template pour un domaine spécifique.

Le processus typique :

  1. Cartographie des sources : Quels sont tous les fichiers, bases de données, API utilisées dans votre entreprise ?
  2. Définition des contraintes : Quelles réponses sont acceptables ? Quelles sont les limites ?
  3. Conception de la vérification : Comment allez-vous vérifier que la réponse est juste ? Avec un autre LLM ? Un humain ? Une règle logique ?
  4. Tests itératifs : Posez des questions connues pour lesquelles vous connaissez la bonne réponse. Voyez où le modèle échoue. Corrigez. Recommencez.

Les secteurs réglementés - finance, santé, droit - prennent 25 % plus de temps. Parce que les erreurs ont des conséquences légales. Un template mal conçu peut vous exposer à des amendes.

Et l’avenir ?

Les templates ne vont pas disparaître. Au contraire.

Gartner prévoit que 75 % des entreprises réussies utiliseront des templates standardisés d’ici 2026. Pourquoi ? Parce que même les meilleurs modèles ne connaissent pas vos données internes. Vos documents, vos processus, vos règles - ils sont uniques. Aucun LLM ne peut les apprendre sans être guidé.

Google a déjà commencé à automatiser ce processus. Son prototype « AutoPrompt Enterprise » analyse vos schémas de données et génère automatiquement des templates optimisés, avec 92 % d’efficacité. Ce n’est pas encore prêt pour la production, mais c’est l’avenir.

La vraie différence ne sera plus entre les modèles, mais entre les entreprises qui ont investi dans l’ingénierie de prompts et celles qui pensent que « le LLM va tout comprendre ». En 2026, 90 % des échecs d’IA en entreprise viendront d’un mauvais template, pas d’un mauvais modèle.

Qu’est-ce qu’une hallucination dans un LLM ?

Une hallucination est quand un modèle génère une réponse qui semble plausible mais qui est fausse ou inventée. Par exemple, il peut citer un chiffre de vente qui n’existe pas dans vos documents, ou prétendre qu’un produit a été arrêté alors qu’il est toujours disponible. Ce n’est pas une erreur de calcul - c’est une création de contenu sans fondement dans les données fournies.

Pourquoi les prompts simples ne fonctionnent pas en entreprise ?

Les prompts simples comme « Quelle est la situation actuelle ? » ne disent pas au modèle où chercher les informations. Les LLM ne savent pas que vous avez un fichier Excel ou une base de données interne. Ils répondent à partir de ce qu’ils ont appris pendant leur entraînement, pas à partir de vos données. Sans structure, ils combleront les trous avec des hypothèses - c’est-à-dire qu’ils mentiront.

Les templates de prompts remplacent-ils la fine-tuning ?

Non, mais ils en sont une alternative beaucoup plus rapide et moins chère. La fine-tuning coûte des dizaines de milliers d’euros et prend des semaines. Un bon template coûte quelques centaines d’euros en temps de travail et peut être mis en place en quelques jours. Selon Google Research, les templates apportent 70 % des gains de précision de la fine-tuning, à 5 % du coût.

Faut-il utiliser un outil payant pour créer des templates ?

Pas du tout. Les outils open source comme LangChain sont plus puissants et plus flexibles que la plupart des solutions payantes. Les outils payants comme AWS Bedrock sont utiles si vous êtes déjà sur leur écosystème. Mais pour la majorité des entreprises, construire ses propres templates avec LangChain et un système de base de données vectorielle comme Milvus ou ChromaDB est la meilleure approche.

Comment savoir si mon template fonctionne bien ?

Testez-le avec des questions connues. Prenez 20 questions pour lesquelles vous connaissez la bonne réponse. Posez-les à votre système. Calculez le pourcentage de réponses correctes, fausses, et « Je ne sais pas ». Un bon template devrait avoir moins de 10 % d’hallucinations et plus de 85 % de réponses correctes. Si vous avez plus de 20 % de « Je ne sais pas », votre template est trop rigide. Si vous avez plus de 10 % d’erreurs, il est trop vague.

Les templates fonctionnent-ils avec n’importe quel type de données ?

Oui, mais ils doivent être adaptés. Un template pour des données financières (avec des chiffres, des dates, des réglementations) est différent d’un template pour des documents juridiques (avec des articles, des jurisprudences, des termes précis) ou des fichiers techniques (avec des codes, des spécifications, des schémas). Le modèle ne sait pas que vous avez des données de type « contrat » ou « fiche produit ». Vous devez le lui dire clairement dans le template.

3 Commentaires

Philippe Dumond

Philippe Dumond

bon j’ai testé un truc similaire avec un template tout simple et j’ai eu un truc qui répondait 'je ne sais pas' à chaque fois… genre même pour des trucs qui étaient dans le doc. j’ai cru que ça marchait pas, mais en fait c’était juste que j’avais mal nommé la collection dans chroma. j’ai corrigé et là c’était magique. faut juste faire gaffe aux noms de collections, c’est un piège classique.

Cyril Payen

Cyril Payen

Je dois souligner que l’approche en deux étapes, bien que plus lente, est fondamentale pour les contextes réglementés. La chaîne de raisonnement obligatoire permet non seulement de réduire les hallucinations, mais aussi de justifier chaque réponse devant un auditeur externe - ce qui, dans le domaine bancaire ou médical, n’est pas une option, mais une exigence légale. La précision orthographique et la rigueur syntaxique dans les prompts ne sont pas des détails : elles sont des garanties de fiabilité.

david rose

david rose

Les templates ? Trop de théorie. Dans la vraie vie, les gens veulent une réponse rapide, pas un cours de logique. J’ai vu une équipe passer 3 mois à optimiser un template… et au final, le patron a demandé à un stagiaire de répondre à la main. Parce que personne ne voulait lire les réponses du bot. Le vrai problème, c’est la culture d’entreprise, pas le prompt.

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