Il y a cinq ans, écrire un scénario prenait des semaines. Faire un storyboard, des jours. La post-production, des mois. Aujourd’hui, tout ça peut se faire en quelques heures. Pas grâce à un superordinateur dans un laboratoire, mais à un simple prompt tapé sur un écran. L’IA générative n’est plus une promesse. Elle est dans les bureaux de production, les agences de pub, les salles de montage. Et elle change tout.
Le scénario n’est plus un départ, mais un point de départ
Avant, les scénaristes commençaient avec une feuille blanche. Maintenant, ils commencent avec un modèle comme GPT-4 Turbo, qui peut garder en mémoire jusqu’à 128 000 tokens. C’est comme avoir tout un catalogue de films, de séries et de publicités dans la tête. Vous lui dites : "Écris un scénario de 5 minutes sur un livreur qui découvre qu’il transporte un objet magique, dans le style de ‘Black Mirror’ mais avec de l’humour noir". En 90 secondes, vous avez une première version. Pas parfaite. Pas profonde. Mais structurelle.
Les pros l’utilisent pour briser la paralysie du créatif. 73 % des professionnels de la média disent maintenant utiliser l’IA pour l’idée initiale, selon MLQ.ai en 2025. Pourquoi ? Parce qu’elle génère des pistes que vous n’auriez jamais pensé à explorer. Un scénario sur un robot qui apprend à pleurer ? Un thriller où le tueur est un algorithme de recommandation ? L’IA vous sort des sentiers battus.
Mais attention : elle ment. Parfois. On appelle ça les "hallucinations". Un personnage qui change de nom entre la scène 3 et 5. Un événement qui se produit deux fois. Une logique narrative qui s’effondre après 5 minutes. Une étude de l’UCLA en 2025 montre que les scénarios écrits par des humains obtiennent 27 % de mieux en engagement émotionnel. L’IA ne comprend pas la tristesse. Elle la recopie. C’est pourquoi les meilleurs scénaristes ne laissent pas l’IA écrire le scénario. Ils la laissent l’esquisser.
Les storyboards, de la feuille de papier à la vidéo en 4 heures
Imaginez : vous avez une idée de scène. Un homme court dans une rue pluvieuse, un chat noir traverse devant lui, et soudain, le ciel s’ouvre. Avant, il fallait dessiner ça à la main. Ou payer un artiste. Aujourd’hui, vous tapez : "cinématique, réaliste, pluie, homme en manteau noir, chat noir, ciel qui s’ouvre en lumière dorée, style Christopher Nolan, 16:9" dans RunwayML Gen-3 ou Sora d’OpenAI. Et en 12 secondes, vous avez une séquence vidéo de 20 secondes.
Un monteur sur Reddit, "FilmEditorPro89", a réduit son temps de storyboard de 3 jours à 4 heures pour un pitch client. Pas besoin de compétences en dessin. Pas besoin de logiciel coûteux. Juste un bon prompt. Les outils comme Leonardo.Ai ou DALL-E 3 génèrent des images à haute résolution en moins de 10 secondes. C’est une révolution pour les petits budgets, les indépendants, les écoles de cinéma.
Le problème ? La cohérence. L’IA ne garde pas la même forme de visage d’une image à l’autre. Le chat noir peut devenir un chien. Le manteau, bleu. Une analyse de Calibraint en mars 2025 montre que 63 % des séquences générées échouent aux tests de continuité. Alors les pros font ça : ils génèrent 10 versions, sélectionnent les 3 meilleures, et les retouchent manuellement. L’IA fait le gros du travail. L’humain fait le travail précis.
La post-production : où l’IA devient le monteur le plus rapide du monde
La post-production, c’est le cauchemar : des heures à chercher un plan, à synchroniser les voix, à ajouter des effets sonores, à coloriser. Maintenant, TwelveLabs permet de chercher dans une vidéo avec des mots. "Trouve-moi le plan où le personnage sourit en regardant la fenêtre". Et voilà - 3 secondes plus tard, vous avez le plan. Avant, ça prenait 30 à 40 % du temps de montage. Disparu.
Les voix ? Eleven Labs génère des voix humaines à 98,5 % de réalisme, selon un test du MIT en 2025. Vous avez un spot en anglais ? L’IA le traduit et le redouble en espagnol, en arabe, en japonais - avec l’intonation exacte du locuteur original. Warner Bros. Discovery a réduit son temps de doublage de 80 %. Pour les pubs, c’est une bombe. Vous pouvez tester 50 versions d’un message en 24 heures. McKinsey montre que ça augmente l’efficacité des tests de contenu de plus de 25 %.
Mais il y a un piège. L’effet "vallée étrange". Quand une voix est presque humaine, mais pas tout à fait. Ça donne un malaise. Andy Beach, à la conférence Streaming Media Connect 2025, a dit : "Pour les contenus premium, ça fait peur." Les auditeurs le sentent. Ils ne savent pas pourquoi. Mais ils ne croient plus. Et ça tue la crédibilité.
Qui utilise quoi ? Et à quel prix ?
Les grandes entreprises ne jouent pas au hasard. Elles veulent de l’intégration. Adobe Creative Cloud. Google Cloud AI. Des outils qui parlent à leurs systèmes existants. 89 % des entreprises de média veulent des outils qui s’insèrent dans leur flux de travail. C’est pourquoi Adobe Firefly, qui utilise uniquement des images sous licence, est devenu un standard.
Pour les indépendants ? C’est plus simple. Voici ce que les pros utilisent en 2025 :
- Scénario : GPT-4 Turbo (via ChatGPT ou Claude) - gratuit pour les bases, 20 $/mois pour le haut débit.
- Storyboard visuel : Leonardo.Ai (150 images gratuites par jour) ou DALL-E 3 (via Bing).
- Video : RunwayML (15 $/mois) ou Sora (accès limité, mais en croissance).
- Voix : Eleven Labs (5 $/mois pour les débutants).
- Correction de continuité : Manuelle - aucune IA ne le fait encore bien.
Les outils open-source comme Stable Diffusion sont gratuits. Mais vous devez avoir un PC puissant. Un GPU NVIDIA A100 avec 80 Go de mémoire. Pas la peine de chercher si vous avez un MacBook d’entrée de gamme.
Les limites réelles - ce que l’IA ne peut pas faire
Elle ne peut pas créer de sens profond. Elle ne peut pas ressentir la perte, la joie, la colère. Elle peut les imiter. Mais pas les vivre. Un scénario qui vous fait pleurer ? Il faut un humain pour l’écrire. Une scène qui vous glace le sang ? Il faut un réalisateur pour la tourner.
Et puis, il y a le droit. En janvier 2025, le Bureau du droit d’auteur des États-Unis a déclaré : "Un contenu généré entièrement par l’IA n’est pas protégé par le droit d’auteur." Si vous le publiez, vous ne pouvez pas le défendre en justice. Et si vous utilisez une voix d’acteur sans autorisation ? Vous risquez une poursuite. L’Europe, avec son AI Act en vigueur depuis février 2025, oblige à étiqueter tout contenu généré par IA. Pas de dissimulation.
Le plus gros risque ? La surproduction. Si tout le monde peut générer un film en 2 heures, que devient la valeur du travail ? Les studios redoutent la "commoditisation du contenu". Des milliers de vidéos de qualité moyenne, produites à la chaîne. Et les bons contenus, ceux qui comptent, noyés dans le bruit.
Le futur : co-création, pas remplacement
Les meilleurs projets de 2025 ne sont pas faits par l’IA. Ni par les humains. Mais par les deux ensemble. C’est ce qu’on appelle la "co-création". L’IA génère 80 % du travail. L’humain apporte l’âme, la logique, la sensibilité. Netflix, selon John Carmack, utilise l’IA pour "démolir et recoller avec plus d’intelligence". Pas pour remplacer les scénaristes. Pour les libérer.
En 2026, on verra des outils en temps réel : plusieurs créatifs travaillent sur un scénario avec l’IA qui propose des variations instantanées. Disney a déjà testé ça. Et la Content Authenticity Initiative - avec Adobe, Microsoft et Intel - travaille sur un système pour prouver qu’un contenu a été modifié par un humain. Une trace numérique. Comme un certificat d’authenticité.
Le vrai défi n’est pas technique. C’est culturel. Faut-il encore appeler "créatif" celui qui tape un prompt ? Faut-il payer quelqu’un pour avoir écrit "une scène de pluie" si l’IA l’a dessinée ? Les juristes, les artistes, les producteurs sont en train de redéfinir ça. Et vous, vous êtes déjà dedans.
L’IA peut-elle écrire un bon scénario tout seule ?
Non. L’IA peut produire des structures, des dialogues, des idées originales, mais elle ne comprend pas les émotions profondes, les sous-entendus culturels ou les arcs narratifs complexes. Les scénarios qui touchent vraiment les spectateurs - ceux qui font pleurer, réfléchir ou avoir peur - sont encore écrits par des humains. L’IA est un outil d’exploration, pas un auteur.
Est-ce que l’IA remplace les monteurs et les storyboarders ?
Pas encore. Elle les décharge de tâches répétitives : chercher des plans, générer des images, synchroniser des voix. Mais les monteurs conservent leur rôle de narrateurs. Ils choisissent ce qui fonctionne émotionnellement. L’IA propose. L’humain décide. Ce n’est pas un remplacement - c’est une collaboration.
Combien de temps faut-il pour apprendre à bien utiliser l’IA en production ?
Pour faire des bases - générer un storyboard ou un premier jet de scénario - il faut 15 à 20 heures. Pour maîtriser les prompts, contrôler les styles visuels et éviter les hallucinations, il faut plus de 80 heures. C’est comme apprendre à utiliser un logiciel de montage : on ne devient pas expert en un week-end.
Est-ce légal d’utiliser l’IA pour créer du contenu commercial ?
Oui, mais avec des limites. Aux États-Unis, le contenu entièrement généré par l’IA n’a pas de droit d’auteur. En Europe, il doit être clairement étiqueté. Et si vous utilisez une voix ou un style protégé (comme celle d’un acteur célèbre), vous risquez une poursuite. Utilisez des outils comme Adobe Firefly, qui ne s’appuient que sur des données autorisées, pour éviter les problèmes.
Quels outils recommandez-vous pour commencer en 2025 ?
Pour les débutants : utilisez ChatGPT pour les scénarios, Leonardo.Ai pour les images, RunwayML pour les vidéos courtes, et Eleven Labs pour les voix. Tous ont des versions gratuites ou très abordables. Commencez par un projet court - une pub de 30 secondes, un court-métrage de 2 minutes. Apprenez en faisant. L’IA ne remplace pas l’expérience - elle l’accélère.
5 Commentaires
Valentin Radu
Je viens de générer un scénario sur un chat qui devient président de la République avec GPT-4 et j’ai failli pleurer tellement c’était absurde et beau
Je sais pas si c’est de l’art mais j’ai passé 2h à le retoucher et j’ai l’impression d’avoir fait un truc qui me ressemble
Jeanne Giddens
Ok mais vous avez tous oublié que l’IA c’est du vol artistique 😒
Elle digère des œuvres de gens vivants et elle les recrache comme un vomito sans âme
Et vous vous réjouissez de ça ? C’est pas de la créativité, c’est du cannibalisme numérique 🤮
Coco Valentine
Je suis désolée mais j’ai vu un storyboard généré par DALL-E pour un spot de lait… le chat était un chien, le soleil était violet, et le bébé avait 5 yeux… et c’était pour un client sérieux 😭
On a dû tout refaire à la main pendant 3 jours… et le client a dit ‘c’est joli mais ça fait pas réel’… bah oui parce que l’IA ne sait pas ce que c’est qu’un bébé 😔
On est pas dans une série de sci-fi, on est dans la vraie vie, avec des larmes, des odeurs, des mains qui tremblent… et l’IA, elle, elle fait des collages de pixels…
Adrien Brazier
Correction : l’étude de l’UCLA ne dit pas que les scénarios humains obtiennent 27 % de mieux en engagement émotionnel - elle dit qu’ils obtiennent 27 % de mieux en *mesure de résonance psychologique*, ce qui est différent. Et vous avez mal cité le taux de réussite des storyboards : 63 % d’échec en continuité, pas en qualité visuelle. Veuillez vérifier vos sources avant d’écrire des pseudo-faits. Merci.
Francine Massaro
Je vous jure que si un jour je vois un film entièrement fait par IA je me lève et je sors de la salle 😤
Et si j’entends une voix d’acteur fake dans un spot de 30s je vais envoyer un mail à la DGCCRF 🤬
On va finir par vivre dans un monde où tout est beau… mais où personne ne sent rien… et ça c’est pire que la guerre